CONJONCTURE ECONOMIQUE -
FRANÇOISE CROUÏGNEAU
Amérique : d'une peur l'autre
[ 06/08/07 ] - Les Echos
La nervosité des marchés financiers est à l'image d'une question qui taraude la Fed, le gouvernement Bush et, à vrai dire, l'ensemble de la planète. Jusque quand perdurera l'étonnante longévité de la prospérité américaine ? Le trou d'air du premier trimestre est venu rappeler qu'une croissance supérieure à 2,5 % n'est pas tenable éternellement. Et même si l'essoufflement du marché du travail, en juillet, n'a rien de dramatique, il constitue un signal suffisamment déplaisant pour alimenter le cycle des craintes et des polémiques qui agitent régulièrement les experts et les investisseurs. Parmi les cauchemars américains se sont ainsi succédé les déficits « jumeaux » du budget et du commerce extérieur, l'effondrement du dollar, l'explosion de la bulle immobilière et désormais une déstabilisation financière venue d'une contagion de la crise des « subprime », ces crédits alloués à des acheteurs peu solvables et aujourd'hui pris dans l'étau de taux d'intérêt de plus en plus coûteux.
Depuis le dernier pic du chômage, 6 % en 2003, l'emploi ne faisait plus partie de ces peurs du lendemain nées de déséquilibres patents. Il pourrait avant longtemps retrouver une place de choix sur cette échelle des risques. Certes, 4,6 % de chômeurs ont encore de quoi faire rêver la France ou l'Allemagne. Mais le rythme des créations d'emplois tend à s'affaiblir. Et avec lui l'un des piliers de la consommation qui assure, bon an mal an, les deux tiers de la richesse américaine.
A partir de là, chacun hésite entre deux scénarios, noir ou rose. Selon le premier, les ménages, déjà affectés par l'envol des coûts du pétrole et une crise de l'immobilier appelée à durer cinq ans si l'on en croit la Fed, commenceraient à s'inquiéter d'un marché du travail qui paraît moins robuste. Largement endettés - leur taux d'épargne reste négatif -, ils seraient contraints de mettre fin à leur boulimie d'achats, entraînant dans le sillage d'un effondrement de la consommation une cascade de déboires pour l'industrie, les services et, bien sûr, les marchés.
Les optimistes refusent un tel enclenchement annonciateur de récession. Ils font valoir une solide progression des revenus salariaux. Et rappellent que les Américains qui ont emprunté pour acheter un logement l'ont, dans leur grande majorité, fait à taux fixe.
En d'autres termes, sans être totalement dégagé, l'horizon ne serait pas bouché. Et les inquiétudes qui montent auraient un avantage majeur : celui de pousser les ménages comme les investisseurs à descendre de leur petit nuage pour mieux apprécier les risques qu'ils encourent. Entre ces deux extrêmes, le président de la Fed, Ben Bernanke, n'aura pas la tâche facile, lors de la réunion de la Banque centrale américaine, demain. Il lui faudra une fois de plus tenter d'exorciser toutes les peurs, celles d'un krach, d'une récession mais aussi d'un retour de flamme inflationniste. Avec la seule arme des taux d'intérêt. Et de quelques petites phrases soigneusement choisies.
FRANÇOISE CROUÏGNEAU
Amérique : d'une peur l'autre
[ 06/08/07 ] - Les Echos
La nervosité des marchés financiers est à l'image d'une question qui taraude la Fed, le gouvernement Bush et, à vrai dire, l'ensemble de la planète. Jusque quand perdurera l'étonnante longévité de la prospérité américaine ? Le trou d'air du premier trimestre est venu rappeler qu'une croissance supérieure à 2,5 % n'est pas tenable éternellement. Et même si l'essoufflement du marché du travail, en juillet, n'a rien de dramatique, il constitue un signal suffisamment déplaisant pour alimenter le cycle des craintes et des polémiques qui agitent régulièrement les experts et les investisseurs. Parmi les cauchemars américains se sont ainsi succédé les déficits « jumeaux » du budget et du commerce extérieur, l'effondrement du dollar, l'explosion de la bulle immobilière et désormais une déstabilisation financière venue d'une contagion de la crise des « subprime », ces crédits alloués à des acheteurs peu solvables et aujourd'hui pris dans l'étau de taux d'intérêt de plus en plus coûteux.
Depuis le dernier pic du chômage, 6 % en 2003, l'emploi ne faisait plus partie de ces peurs du lendemain nées de déséquilibres patents. Il pourrait avant longtemps retrouver une place de choix sur cette échelle des risques. Certes, 4,6 % de chômeurs ont encore de quoi faire rêver la France ou l'Allemagne. Mais le rythme des créations d'emplois tend à s'affaiblir. Et avec lui l'un des piliers de la consommation qui assure, bon an mal an, les deux tiers de la richesse américaine.
A partir de là, chacun hésite entre deux scénarios, noir ou rose. Selon le premier, les ménages, déjà affectés par l'envol des coûts du pétrole et une crise de l'immobilier appelée à durer cinq ans si l'on en croit la Fed, commenceraient à s'inquiéter d'un marché du travail qui paraît moins robuste. Largement endettés - leur taux d'épargne reste négatif -, ils seraient contraints de mettre fin à leur boulimie d'achats, entraînant dans le sillage d'un effondrement de la consommation une cascade de déboires pour l'industrie, les services et, bien sûr, les marchés.
Les optimistes refusent un tel enclenchement annonciateur de récession. Ils font valoir une solide progression des revenus salariaux. Et rappellent que les Américains qui ont emprunté pour acheter un logement l'ont, dans leur grande majorité, fait à taux fixe.
En d'autres termes, sans être totalement dégagé, l'horizon ne serait pas bouché. Et les inquiétudes qui montent auraient un avantage majeur : celui de pousser les ménages comme les investisseurs à descendre de leur petit nuage pour mieux apprécier les risques qu'ils encourent. Entre ces deux extrêmes, le président de la Fed, Ben Bernanke, n'aura pas la tâche facile, lors de la réunion de la Banque centrale américaine, demain. Il lui faudra une fois de plus tenter d'exorciser toutes les peurs, celles d'un krach, d'une récession mais aussi d'un retour de flamme inflationniste. Avec la seule arme des taux d'intérêt. Et de quelques petites phrases soigneusement choisies.
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